Editorial – Malek BOUHAOUALA, Président AUEG

La pandémie du Coronavirus a mis au jour l’importance du système de santé et ses liens influents avec les différents secteurs socio-économiques de notre pays et nos territoires. Les difficultés auxquelles nous sommes confrontés, avec nos organisations sociales et économiques en tête, font réfléchir sur les priorités et les solutions à anticiper pour l’avenir. Des écosystèmes socio-économiques entiers et des secteurs prioritaires comme la santé, la logistique, la solidarité sociale, etc. ont confirmé leur poids stratégique pour notre pays. Ce qui appelle plus que jamais la nécessité de construire de nouvelles coopérations, d’inventer de nouvelles formes d’alliances, de vie et de travail au niveau des territoires.

Cette crise révèle surtout l’importance de l’organisation de notre système de santé et la pertinence de faire converger des secteurs clés et leurs acteurs souvent un peu trop cloisonnés. Cela repose évidemment sur un changement de dimension, de mentalités et des prises d’initiatives innovantes. Le recours à des modes de travail collaboratif, des outils technologiques performants ouverts et partagés peut contribuer aux solutions.

Ces problématiques ont été posées par les experts et les groupes de travail appartenant à l’AUEG. Des solutions et des schémas d’évolution ont d’ores et déjà été respectivement réfléchies et proposés par les groupes de travail de l’AUEG. Je peux citer le télétravail, la télésanté, le bien vieillir en augmentant son autonomie et son état de santé, la réorganisation du système de santé, etc. En effet, les groupes de travail centrés sur la Santé, les Tiers-lieux d’activités et le Télétravail, ainsi que celui du Bien vieillir ont œuvré depuis des années pour la mise en œuvre d’un écosystème performant articulant la médecine de ville, le patient et l’hôpital dans le cadre des évolutions sociétales et technologiques contemporaines. Nos partenaires issus de la recherche publique, de l’université, des entreprises, des industries, des collectivités locales et de la société civile y ont fortement contribué et montré leur capacité à collaborer dès lors qu’ils se trouvent au sein d’une alliance ouverte transcendant les raisonnements institutionnels et les enjeux particuliers.

Nous pouvons imaginer que le développement de nouveaux concepts et modes de travail en lien avec les tiers-lieux d’activité permet de répondre à des situations de crise nécessitant un éloignement pouvant devenir plus fréquentes. Ce concept favorise un savoir-faire en matière d’organisation de nouvelles formes de travail répondant aux exigences des temps modernes et des crises complexes. Le télétravail constitue une réelle alternative que l’AUEG soutient très concrètement depuis le début des années 2000.

Le contexte actuel est en train de remettre en cause plusieurs des stratégies et des doctrines concernant notre organisation sociale et la prise en charge des populations en temps de crise. La question corolaire qui se pose est celle de l’efficacité et de l’équité d’accès aux soins et autres services au niveau des territoires. Nous pouvons constater que ce dernier point est désormais une priorité et que la solution peut venir de la mise en place d’écosystèmes territoriaux qui répondent à la fois aux spécificités régionales et à l’exigence d’une solidarité nationale.

Cette crise a mis très nettement en évidence les limites des stratégies et des dispositifs actuels. Ces derniers rationalisés à partir de paradigmes à renouveler car davantage dépendants d’écosystèmes industriels situés à l’extérieur des territoires. Nous comprenons bien que la spécialisation des économies et des territoires est une contrainte qui a pesé jusqu’à présent, mais il ressort de la crise sanitaire et socio-économique provoquée par le Coronavirus que la santé ne peut être mise dans la balance des choix de spécialisation. En effet, la délocalisation industrielle ne peut être justifiée que par la « compétitivité par les coûts ». Par exemple, le manque de masques de protection illustre une stratégie de délocalisation pour des raisons de coûts qui in fine révèle une situation de dépendance que nous risquons de payer très cher au sens propre et figuré.

De fait, nous mesurons mieux les liens influents entre les dispositifs de santé et l’autonomie économique. Il n’est pas dénué de sens économique d’investir dans le développement d’industries innovantes en lien avec les secteurs stratégiques, la santé en tête, l’éducation, la recherche, la logistique, pour répondre à des priorités publiques. L’alliance entre la recherche publique et les entreprises, entre les investissements publics et privés peut conduire à des avancées majeures. Ces dernières pourront dans un deuxième temps s’exporter, produire un retour sur investissement tout en répondant à des enjeux socio-économiques d’envergure internationale. Investir pour acheter des solutions fondamentales auprès de nos entreprises, sous condition qu’elles restent dans les écosystèmes territorialisés, permet un triple effet vertueux : autonomie, développement et rayonnement international.

L’ensemble des travaux que l’Alliance mène devra continuer à contribuer, pleinement et à son niveau, dans la création de conditions favorables aux alliances vertueuses, aux innovations collaboratives et aux réflexions permettant les transformations qui s’imposent à notre société et nos territoires. C’est notre vocation depuis plus de 73 ans.

Il est également de notre devoir de dire toute notre gratitude aux acteurs de notre pays qui prennent des décisions, des risques et qui s’engagent pleinement pour nous sortir de cette crise inédite. Le gouvernement, les personnels soignants, les acteurs de la logistique et de la production agro-alimentaire, les commerces, les enseignants… Les citoyens qui respectent le confinement et tous ceux qui agissent tous les jours méritent notre respect et notre reconnaissance.